Kiefer à la Bibliothèque Nationale
Le livre ,en majesté nait de la vague et de l'écume telle la beauté d'Aphrodite. L'écriture et la représentation par l'image , données comme contradictoire dans les livres sacrés sont unies.
Le personnage qui pose n'est là que pour donner la dimension de la toile ,et dire qu'en homme libre" il chérit la mer " et doit aux livres la majeure part de sa modeste lucidité!
Le personnage qui pose n'est là que pour donner la dimension de la toile ,et dire qu'en homme libre" il chérit la mer " et doit aux livres la majeure part de sa modeste lucidité!
Des croûtes les plus denses à l'aquarelle la plus fine
Des livres a demi carbonisés sur un fond de résineux et de ciel de neige disent la tragédie de l'esprit lorsque le nazisme s'est emparé d'un pays de haute culture . Kiefer réalise une synthèse culturelle qui dépasse l'Europe . Il serait temps que les installations de Barjac, à la Ribaute reçoivent la considération des deux pays.
Mis à jour le 21/10/2015 à 12H14, publié le 21/10/2015 à 12H11
Des livres a demi carbonisés sur un fond de résineux et de ciel de neige disent la tragédie de l'esprit lorsque le nazisme s'est emparé d'un pays de haute culture . Kiefer réalise une synthèse culturelle qui dépasse l'Europe . Il serait temps que les installations de Barjac, à la Ribaute reçoivent la considération des deux pays.
AvecThaddaeus Roppac, Anselm Kiefer , 23 ans de rencontres à des expos superbes
- Victor HUGO (1802-1885)
A qui la faute ?
Tu viens d'incendier la Bibliothèque ?
- Oui.
J'ai mis le feu là.
- Mais c'est un crime inouï !
Crime commis par toi contre toi-même, infâme !
Mais tu viens de tuer le rayon de ton âme !
C'est ton propre flambeau que tu viens de souffler !
Ce que ta rage impie et folle ose brûler,
C'est ton bien, ton trésor, ta dot, ton héritage
Le livre, hostile au maître, est à ton avantage.
Le livre a toujours pris fait et cause pour toi.
Une bibliothèque est un acte de foi
Des générations ténébreuses encore
Qui rendent dans la nuit témoignage à l'aurore.
Quoi! dans ce vénérable amas des vérités,
Dans ces chefs-d'oeuvre pleins de foudre et de clartés,
Dans ce tombeau des temps devenu répertoire,
Dans les siècles, dans l'homme antique, dans l'histoire,
Dans le passé, leçon qu'épelle l'avenir,
Dans ce qui commença pour ne jamais finir,
Dans les poètes! quoi, dans ce gouffre des bibles,
Dans le divin monceau des Eschyles terribles,
Des Homères, des jobs, debout sur l'horizon,
Dans Molière, Voltaire et Kant, dans la raison,
Tu jettes, misérable, une torche enflammée !
De tout l'esprit humain tu fais de la fumée !
As-tu donc oublié que ton libérateur,
C'est le livre ? Le livre est là sur la hauteur;
Il luit; parce qu'il brille et qu'il les illumine,
Il détruit l'échafaud, la guerre, la famine
Il parle, plus d'esclave et plus de paria.
Ouvre un livre. Platon, Milton, Beccaria.
Lis ces prophètes, Dante, ou Shakespeare, ou Corneille
L'âme immense qu'ils ont en eux, en toi s'éveille ;
Ébloui, tu te sens le même homme qu'eux tous ;
Tu deviens en lisant grave, pensif et doux ;
Tu sens dans ton esprit tous ces grands hommes croître,
Ils t'enseignent ainsi que l'aube éclaire un cloître
À mesure qu'il plonge en ton coeur plus avant,
Leur chaud rayon t'apaise et te fait plus vivant ;
Ton âme interrogée est prête à leur répondre ;
Tu te reconnais bon, puis meilleur; tu sens fondre,
Comme la neige au feu, ton orgueil, tes fureurs,
Le mal, les préjugés, les rois, les empereurs !
Car la science en l'homme arrive la première.
Puis vient la liberté. Toute cette lumière,
C'est à toi comprends donc, et c'est toi qui l'éteins !
Les buts rêvés par toi sont par le livre atteints.
Le livre en ta pensée entre, il défait en elle
Les liens que l'erreur à la vérité mêle,
Car toute conscience est un noeud gordien.
Il est ton médecin, ton guide, ton gardien.
Ta haine, il la guérit ; ta démence, il te l'ôte.
Voilà ce que tu perds, hélas, et par ta faute !
Le livre est ta richesse à toi ! c'est le savoir,
Le droit, la vérité, la vertu, le devoir,
Le progrès, la raison dissipant tout délire.
Et tu détruis cela, toi !
- Je ne sais pas lire.
Anselm Kiefer expose à la BnF sa bibliothèque de livres uniques
Par Valérie Oddos @valerieoddos Journaliste, responsable de la rubrique Expositions de Culturebox
Avant une grande rétrospective au Centre Pompidou à partir de la mi-décembre, Anselm Kiefer expose à la BnF une partie plus secrète, plus intime de son travail, ses livres, des pièces uniques qui ressemblent à des sculptures et qui abordent tous les thèmes de son oeuvre, nourrissant constamment celle-ci (jusqu'au 7 février 2016).
Fasciné par l'écrit, Anselm Kiefer fait des livres depuis qu'il est petit. Ils représentent même 60% de son œuvre. Le plus ancien présenté à la Bibliothèque nationale de France date de quand il avait neuf dix ans, c'est un recueil de contes illustré.
Depuis, la forme a changé, l'artiste allemand installé en France crée de grands livres dans les matériaux les plus divers, plâtre, plomb, carton, ornés de peinture, de sable, de cendre, de photos, de végétaux… Des pièces uniques, qui l'accompagnent dans son atelier, qu'il montre peu et qu'il a eu envie d'exposer.
"Dans mon œuvre, le livre est très important. Il est un répertoire de formes et une manière de matérialiser le temps qui passe (…). Son aspect esthétique, son aspect matériel, m'intéresse beaucoup. Certains sont de véritables sculptures, plus grands que la taille humaine, ouverts mais impossibles à feuilleter", a dit Anselm Kiefer en 2007 (entretien avec Pierre Assouline dans Anselm Kiefer, Sternenfall, Editions du Regard).
Une centaine de ces livres été choisis pour être exposées avec quelques sculptures et son encadrés par deux tableaux monumentaux liés à l'écrit.
"C'est Anselm Kiefer qui a réalisé la mise en espace de l'exposition. Une espèce d'espace sacré pour célébrer le livre. Pour montrer que dans son œuvre les mots, l'écriture, tout procède d'une pensée verbale. Même si les mots ne sont pas lisibles, son œuvre est hantée par l'écriture", explique Marie Minssieux-Chamonard, conservateur à la BnF et commissaire de l'exposition.
L'espace ressemble à une église, une grande nef et des chapelles latérales, le tout encadré par deux grands tableaux : à l'entrée, "Lichtung" (Clairière), créé pour l'exposition, est un paysage de forêt de sapins enneigée au milieu duquel est suspendu un tas de livres calcinés : un hommage à Martin Heidegger qui fait allusion aussi à l'ambivalence du philosophe, aux autodafés nazis et au pouvoir purificateur du feu.
A l'autre bout, "Das Buch" (Le livre), une marine où un grand livre en plomb, immobile, domine des flots en perpétuel mouvement.
Dans les deux premières salles latérales, on a déménagé la bibliothèque d'Anselm Kiefer.
"J'étais tellement impressionnée par sa bibliothèque que j'ai souhaité qu'on en profite, qu'on voie qu'il travaille dans cet univers tout le temps", raconte Marie Minssieux-Chamonard. "Les étagères proviennent de son atelier. Il a une salle dédiée à ses livres, ils sont rangés comme ça sur des étagères métalliques, avec des livres très lourds, en plomb, en plâtre, des herbiers géants. C'est un peu secret, c'est son laboratoire. Il y a beaucoup de thématiques qu'on trouve dans ses tableaux et dans ses sculptures qu'il travaille d'abord dans le livre", ajoute la commissaire.
Au milieu de l'exposition, des vitrines horizontales montrent les livres ouverts, classés par thèmes et par styles. Les premiers, ceux des années 1960-1970 annoncent déjà tous les thèmes abordés dans l'œuvre : l'histoire allemande, les femmes. L'artiste aurait aimé être poète ou écrivain et consigne depuis toujours dans un journal ses notes de lecture, ses réflexions, ses projets.
A partir du milieu des années 1970 Anselm Kiefer intègre divers matériaux à ses livres : sur une base photographique, il met du sable, de la cendre, de l'argile.
Il y a les femmes, d'abord. Fasciné par la figure de Lilith ("Liliths Töchter", 1998), première Eve, selon la Kabbale, il lui dédie plusieurs livres.
"Elle a voulu être l'égale de l'homme, le créateur a refusé, du coup elle s'est révoltée et s'est exilée volontairement dans les ruines. En même temps, elle est liée à Saturne, à la mélancolie, et en même temps on dit que c'est un démon. Anselm Kiefer a beaucoup d'affection pour ce personnage très moderne", explique la commissaire. Sur des photos aériennes de villes, il a collé des robes en plomb et du sable, en hommage aussi aux femmes allemandes qui ont reconstruit les villes détruites après la guerre.
D'autres livres sont consacrés aux écrivains, notamment au poète juif roumain Paul Celan. Toujours obsédé par la Seconde guerre mondiale, Kiefer part d'un paysage hivernal où des sillons fuient vers l'horizon, une image rappelant les voies ferrées qui menaient aux camps de la mort. Sur les sillons, il a inscrit les vers écrits par Paul Celan à l'annonce de la mort de son père dans les camps. Sur un autre livre de la même série, il a collé des cheveux, des bouts de branches.
A partir du milieu des années 1990 il y a les livres consacrés à la cosmogonie, où le ciel étoilé est représenté par des graines de tournesol collées sur les pages. "Avec ce motif très présent du tournesol, parce que le tournesol c'est une plante cosmique pour lui, qui renvoie au flux vital reliant la terre aux étoiles", explique Marie Minssieux-Chamonard.
Kiefer multiplie les motifs végétaux ("La vie secrète des plantes") et se fait parfois léger, avec des fleurs colorées.
Ses derniers livres, des livres érotiques, Anselm Kiefer les dédie à Rodin. Ils sont en plâtre poli imitant le marbre sur lequel des nus sont peints à l'aquarelle. "Doux comme la peau mais froids comme du marbre, c'est ce que dit l'artiste", rapporte la commissaire.
Et tout autour des vitrines, des sculptures évoquent le livre, par la forme ou les symboles. "Le Rhin" déploie sur 360 degrés ses grandes pages où des gravures du fleuve évoquent, toujours, la culture allemande et son dévoiement par le nazisme.
Une autre sculpture ("La Brisure des vases", 2015, terminée par Kiefer sur place), composée de verre brisé et de livres en plomb, fait allusion au mythe kabbalistique de la Création, renvoyant en même temps à la création artistique. De grands tournesols plantés dans une presse typographique ("La lettre perdu", 2012) rappellent l'invention de Gutenberg et évoquent l'élan spirituel.
Anselm Kiefer, l'alchimie du livre, Bibliothèque nationale de France (site François Mitterrand), quai François Mauriac, Paris 13e
Tous les jours sauf lundi et jours fériés
Du mardi au samedi : 10h-19h
Dimanche : 13h-19h
Tarifs : 9€ / 7€
Du 20 octobre 2015 au 7 février 2016
Une grande rétrospective Anselm Kiefer est prévue au Centre Pompidou du 16 décembre 2015 au 18 avril 2016
Depuis, la forme a changé, l'artiste allemand installé en France crée de grands livres dans les matériaux les plus divers, plâtre, plomb, carton, ornés de peinture, de sable, de cendre, de photos, de végétaux… Des pièces uniques, qui l'accompagnent dans son atelier, qu'il montre peu et qu'il a eu envie d'exposer.
"Dans mon œuvre, le livre est très important. Il est un répertoire de formes et une manière de matérialiser le temps qui passe (…). Son aspect esthétique, son aspect matériel, m'intéresse beaucoup. Certains sont de véritables sculptures, plus grands que la taille humaine, ouverts mais impossibles à feuilleter", a dit Anselm Kiefer en 2007 (entretien avec Pierre Assouline dans Anselm Kiefer, Sternenfall, Editions du Regard).
Vue d'installation, Croissy, 2015
© Anselm Kiefer Photo © Anselm Kiefer
Un espace sacré pour célébrer le livre
Une centaine de ces livres été choisis pour être exposées avec quelques sculptures et son encadrés par deux tableaux monumentaux liés à l'écrit."C'est Anselm Kiefer qui a réalisé la mise en espace de l'exposition. Une espèce d'espace sacré pour célébrer le livre. Pour montrer que dans son œuvre les mots, l'écriture, tout procède d'une pensée verbale. Même si les mots ne sont pas lisibles, son œuvre est hantée par l'écriture", explique Marie Minssieux-Chamonard, conservateur à la BnF et commissaire de l'exposition.
L'espace ressemble à une église, une grande nef et des chapelles latérales, le tout encadré par deux grands tableaux : à l'entrée, "Lichtung" (Clairière), créé pour l'exposition, est un paysage de forêt de sapins enneigée au milieu duquel est suspendu un tas de livres calcinés : un hommage à Martin Heidegger qui fait allusion aussi à l'ambivalence du philosophe, aux autodafés nazis et au pouvoir purificateur du feu.
Anselm Kiefer, "Liliths Töchter", 1998, collection particulière
© Anselm Kiefer photo © atelier Anselm Kiefer
La bibliothèque d'Anselm Kiefer, son laboratoire secret
A l'autre bout, "Das Buch" (Le livre), une marine où un grand livre en plomb, immobile, domine des flots en perpétuel mouvement.Dans les deux premières salles latérales, on a déménagé la bibliothèque d'Anselm Kiefer.
"J'étais tellement impressionnée par sa bibliothèque que j'ai souhaité qu'on en profite, qu'on voie qu'il travaille dans cet univers tout le temps", raconte Marie Minssieux-Chamonard. "Les étagères proviennent de son atelier. Il a une salle dédiée à ses livres, ils sont rangés comme ça sur des étagères métalliques, avec des livres très lourds, en plomb, en plâtre, des herbiers géants. C'est un peu secret, c'est son laboratoire. Il y a beaucoup de thématiques qu'on trouve dans ses tableaux et dans ses sculptures qu'il travaille d'abord dans le livre", ajoute la commissaire.
Anselm Kiefer, "Das Lied von der Zeder - Für Paul Celan" 2005, BnF, Réserve des livres rares
© Anselm Kiefer
Des ouvrages de sable, de cendre, d'argile
Au milieu de l'exposition, des vitrines horizontales montrent les livres ouverts, classés par thèmes et par styles. Les premiers, ceux des années 1960-1970 annoncent déjà tous les thèmes abordés dans l'œuvre : l'histoire allemande, les femmes. L'artiste aurait aimé être poète ou écrivain et consigne depuis toujours dans un journal ses notes de lecture, ses réflexions, ses projets.A partir du milieu des années 1970 Anselm Kiefer intègre divers matériaux à ses livres : sur une base photographique, il met du sable, de la cendre, de l'argile.
Il y a les femmes, d'abord. Fasciné par la figure de Lilith ("Liliths Töchter", 1998), première Eve, selon la Kabbale, il lui dédie plusieurs livres.
Anselm Kiefer, "Blutblume", 2001, collection particulière
© Anselm Kiefer Photo © Charles Duprat
Les femmes, les écrivains, la cosmogonie
"Elle a voulu être l'égale de l'homme, le créateur a refusé, du coup elle s'est révoltée et s'est exilée volontairement dans les ruines. En même temps, elle est liée à Saturne, à la mélancolie, et en même temps on dit que c'est un démon. Anselm Kiefer a beaucoup d'affection pour ce personnage très moderne", explique la commissaire. Sur des photos aériennes de villes, il a collé des robes en plomb et du sable, en hommage aussi aux femmes allemandes qui ont reconstruit les villes détruites après la guerre.D'autres livres sont consacrés aux écrivains, notamment au poète juif roumain Paul Celan. Toujours obsédé par la Seconde guerre mondiale, Kiefer part d'un paysage hivernal où des sillons fuient vers l'horizon, une image rappelant les voies ferrées qui menaient aux camps de la mort. Sur les sillons, il a inscrit les vers écrits par Paul Celan à l'annonce de la mort de son père dans les camps. Sur un autre livre de la même série, il a collé des cheveux, des bouts de branches.
A partir du milieu des années 1990 il y a les livres consacrés à la cosmogonie, où le ciel étoilé est représenté par des graines de tournesol collées sur les pages. "Avec ce motif très présent du tournesol, parce que le tournesol c'est une plante cosmique pour lui, qui renvoie au flux vital reliant la terre aux étoiles", explique Marie Minssieux-Chamonard.
Anselm Kiefer, "Der Rhein", 1983, collection particulière
© Anselm Kiefer Photo © Charles Duprat
Des livres érotiques dédiés à Rodin
Kiefer multiplie les motifs végétaux ("La vie secrète des plantes") et se fait parfois léger, avec des fleurs colorées.Ses derniers livres, des livres érotiques, Anselm Kiefer les dédie à Rodin. Ils sont en plâtre poli imitant le marbre sur lequel des nus sont peints à l'aquarelle. "Doux comme la peau mais froids comme du marbre, c'est ce que dit l'artiste", rapporte la commissaire.
Et tout autour des vitrines, des sculptures évoquent le livre, par la forme ou les symboles. "Le Rhin" déploie sur 360 degrés ses grandes pages où des gravures du fleuve évoquent, toujours, la culture allemande et son dévoiement par le nazisme.
Une autre sculpture ("La Brisure des vases", 2015, terminée par Kiefer sur place), composée de verre brisé et de livres en plomb, fait allusion au mythe kabbalistique de la Création, renvoyant en même temps à la création artistique. De grands tournesols plantés dans une presse typographique ("La lettre perdu", 2012) rappellent l'invention de Gutenberg et évoquent l'élan spirituel.
Anselm Kiefer, l'alchimie du livre, Bibliothèque nationale de France (site François Mitterrand), quai François Mauriac, Paris 13e
Tous les jours sauf lundi et jours fériés
Du mardi au samedi : 10h-19h
Dimanche : 13h-19h
Tarifs : 9€ / 7€
Du 20 octobre 2015 au 7 février 2016
Une grande rétrospective Anselm Kiefer est prévue au Centre Pompidou du 16 décembre 2015 au 18 avril 2016
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