Barjac à dit: merci Michel



                                                                       Saint Martin de Valgalgues, le 8 février 2016
Hommage
Michel RICOUX



Nous accompagnons aujourd’hui, Michel RICOUX, 58 ans, avec la tristesse devant une vie trop brève et le goût amer de n’avoir pas pu agir assez pour qu’il vive encore un peu.
Adopté par Marcelle et Jeannot, à un âge, 5 ans où déjà beaucoup de choses sont jouées de ce qui fera la vie, Michel recevra une attention, des soins comme jamais il n’en avait reçu auparavant. Avant c’était les cris, les coups qui lui coûteront un œil, c’était un regret d’être au monde. L’enfer, Jeannot, son père adoptif en sortait aussi. Les camps nazis de Buchenvald et Dora lui en avaient appris l’infamie humaine comme les plus sublimes élans de générosité, de bonté et de sacrifice… c’est débordant d’affection qu’avec son épouse, en région parisienne, ils ont fait renaître Michel, ouvrier d’élite, Jeannot n’aura de cesse que de lui faire passer un CAP de plomberie, dont Michel était très fier.
Son adolescence fut difficile. C’est le titi parisien, avec son accent, sa dégaine son sens de la solidarité, de l’équipe, de la parole donnée qu’il devient.
Lorsqu’à la retraite Marcelle, sa mémère comme il disait, Jeannot et Patricia viennent à Barjac, c’est à une autre vie qu’il doit s’adapter. De petits boulots au noir en emplois précaires, Michel ne reste jamais inactif. Il est rude à la tâche, endurant et appliqué.
Le week-end, c’est la fête avec les copains, la castagne toujours lorsqu’on s’en prend à ses pots, à ceux qu’il affectionne…il fait peu de cas de sa santé et la flambe avec un certain panache. En 1999, il entre à la Mairie. Pour la première fois il est assuré, déclaré et intégré à une équipe.
Il supporte mal l’autorité mais il travaille dur, dans les tâches les plus ingrates peu économe de son dos et de sa sueur. Il est ponctuel et adopte avec bon sens les travaux municipaux en faisant preuve d’esprit critique et d’initiative. Tout le monde lui reconnait des qualités et sait qu’il mérite bien sa paye.

C’est le devoir d’une commune de tendre la main à ceux qui n’ont pas pu prendre pied.
Je l’ai fait et n’ai pas eu à la regretter. Connaissant ses blessures intérieures ses camarades de travail ont partagé mon indulgence et je les en remercie.
L’accident de mobylette en venant le matin à l’atelier le déstabilisera fondamentalement, pour les blessures lourdes qu’il savait endurer stoïquement voire les mépriser avec fierté, ce n’était pas un pleureur, mais surtout parce que cela le coupera de son équipe, de son travail, de son utilité.
Il sombrera peu à peu dans ce syndrome dit de Diogène, fait de solitude, d’angoisse et de peur du monde. Seul un repas porté par Richard le relira, ainsi que les papiers que Cathy accomplissait pour les congés de maladie.
Je savais que ni le docteur, ni personne ne pouvait le sortir de cet enfoncement … il rejetait ceux qu’il aimait pour ne pas les soumettre au triste spectacle de sa maladie.
Son tourment venu du fond de sa petite enfance aura endolori sa vie et malgré l’amour de ses parents, de sa sœur, notre affection à nous aussi, ses camarades des bons et mauvais jours et de travail, il s’est cru seul  regardant venir la fin avec le courage bravache de ce faux dur au cœur tendre, fidèle et LOYAL qu’il était.

                                                                           Edouard CHAULET,

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