HOMMAGE A JEAN VASCA - 28 DECEMBRE 2016

"Les blessures font partie des vivants, elles habitent leur vie comme une ligne d’infra basse dans la soute des machines, elles nous accompagnent dans nos rires, s’accrochent aux branches de nos arbres les plus paisibles. Elles dansent sur les houles de l’incommensurable peine des hommes, rejoignent les fantômes innombrables de l’absence, de nos erreurs et de nos lâchetés. Et je les porte en moi comme un sac de larmes sur les épaules, cheminant vers des sources légères, dans la cicatrice des mémoires et la trève de sanglots lancinants. " BRUNO RUIZ.




Photos : Christian PIERREDON

Annie VASCA et Morice BENIN

Josy Mazé

Jacques BERTIN

Michel ARBATZ

Claude MAS

Bruno RUIZ

Natasha BEZRICHE

M. BLAISE

Francesca SOLLEVILLE qui était venue d'Antraigues accompagnée de Colette Ferrat




Les frères CUFFY Robert et Georges     


Amis, frangins, camarades, compagnons….  Chère Annie, cher Vincent,

Le téléphone a sonné…ce n’était pas pour préparer l’an nouveau avec un réveillon à la clé…mais un appel de détresse d’Annie. Jean n’avait pas vu le matin d’hiver. Il nous faut désormais le partager entre tous ceux qui l’aiment et, ceux qui, je n’en doute pas viendront à son œuvre.
Des monceaux de mots et des notes en héritage, frétillants de vie. Je ne vais pas en rajouter. Jean qui a tant creusé la vie a accueilli sa fin. Tranquillement, il l’a préméditée. Il a mis de l’ordre dans ses affaires chansons. Il a fait sa malle avec un livre « la concordance des chants », un dernier CD « Saluts », passé une belle journée au jardin. Il s’est couché. Fini. Son œuvre bien rangée, « récatée », attendait cet instant pour prendre un nouvel envol, comme notre amitié pour donner toute sa mesure.
Les réseaux ont abandonné la langue du bois dormant, les journaux, presque, et j’ai découvert avec Jacques Bertin combien Jean était un « inconnu célèbre ».
Pendant cette semaine un grand remuement s’est produit avec un impossible inventaire. Chacun sait ici son parcours. Sans la débâcle de 40, il serait né à Charleville à l’ombre, d’un arrière-grand-père député maire engagé, de bonne gauche, et d’un certain Arthur. Le garçon du pays des sangliers étudiera au lycée Buffon, à Paris avec Garaudy comme prof, ce compagnon des existentialistes et des croyants…aux «au-delà qui chantent ». Il s’est détourné d’une licence de lettres pour une envie de création politisée et poétisée en réalisant un film empruntant à Paul. Eluard son titre « De l’horizon d’un seul à l’horizon de tous ». Il est déjà entiché de Léo Ferré, qui restera son maître. S’enchainent des rencontres nombreuses avec des piliers de cabarets, la Colombe, l’Ecole Buissonnière… Jean était une mémoire vivante de la chanson et de la poésie sur plus d’un demi-siècle que les radios ont loupé (à part « Grille Ouverte »). Luc Berrimont, animateur de radio et poète bon vivant et Michel Lancelot font la promotion de notre passionné de poésie et aussi de fraternité artistique.
Jean milite pour la chanson « à texte », pour une reconnaissance des artistes chanteurs au syndicat avec Claude Vinci. Toujours « L’horizon de tous »… Je l’avais entendu à Tharaux son « atelier d’été » parmi les cinq qu’il invitait Bertin, Elbaz, Brua, Juvin,… En 1980, il vient à Alès avec Jean-Claude et Josette Garcia soutenir la grève des mineurs de Ladrech… Je découvre l’homme observateur, laconique, solide et cohérent. Il m’autorise, un peu éberlué à adresser son poème « Village » aux familles de mon canton et me propose de transporter son petit festival de Tharaux à Barjac en 1992.



                VILLAGE

J’ai fait village de moi-même
Entre la pierre et le soleil
Je me peuple de mots qui dansent
Dans le thym bleuté du matin
Village en nous comme un  défi

Village d’être parmi vous
Amis de la même brûlure
Amis de la même blessure
La nuit se fleurit de hiboux
Village comme un poing fermé
Sur le cœur du monde qui bat
Une cigale au fond de moi
Métallise l’éternité


Village de vivre et de dire
La vérité nue des saisons
A la source du chant profond
Un amandier rêve et respire
Village comme une vigie
A la proue vivante du temps
Ficelé de vigne et de vent


A la faveur « d’un abus de pouvoir », donc une nouvelle scène, devenue d’importance s’ouvre à Barjac. D’entrée il me présente Jean Ferrat, Leprest, Joyet, Lafaille, Bertin, Ogeret, Solleville, Haillant, Ruiz. L’homme qui était passé à l’Olympia, une première pour un chanteur « rive gauche », qui avait reçu le grand prix du disque, le prix Charles Cros, ne gardait rien pour lui et se vouait aux autres, par son fichier, son réseau d’amis. Il allumait un feu chaud et éclairant dans ces temps du givre de la chanson. Jean était attentif au monde et participait avec ses mots armés à la mêlée.

Cuisinier des mots et des mets il a toujours eu une haute exigence et le culte de l’amitié. Je pense à sa tendresse lorsque m’étant brisé la jambe, il est venu me chercher avec mille précautions pour une journée de fête chez lui… Je pense aussi au tour de chant qu’il a offert à mes amis, à la maison pour mon anniversaire.

« Garé dans le Gard », à Rivières il ne cesse d’écrire, de composer et de somptueux CD voient le jour pour notre bonheur. Un travail obstiné,  convaincu qu’il est de son art, indifférent ou presque, à l’accueil, pressé, haut sans être hors… Jean lisait beaucoup, le meilleur de la radio, des films, des petits plats et des gros cigares.

Un être vivant, incrusté en nous à jamais.



Tout compte fait, il s’exprime en 92 sur sa vie :






Edouard CHAULET
28 décembre 2016

pour mon anniversaire, sous le grand chêne de la maison, pour l'amitié et un bon pistou, un fabuleux concert devant 65 amis


Lors d'une sortie de disque, il me recevait en grande pompe..

cuisinier des mots et des mets 

Cuba, si! 
Les heures d'or 

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